Agrémenté d’un chapitre cross-over avec Bolt Crank, le héros de la première série de l’auteur : Eat-Man, ce cinquième volume de Ray met en lumière les écœurants projets des hommes que l’héroïne poursuit. Yoshitomi Akihito en profite pour montrer les problèmes en relation avec les dons d’organes et ses divers trafics, mais aussi la cruauté de certains scientifiques qui n’ont aucune limite ni respect pour leur prochain. Le scénario du manga s’approfondit, et au delà du simple divertissement, Ray peut sembler visionnaire grâce à certaines idées et technologies créées pour les besoins de l’histoire. L’autre point particulièrement mis en avant pour ce tome est la relation qui lie Shinoyama et Ray. Si le garçon en est profondément amoureux et lui est dévoué corps et âme, cette dernière est obsédée par Kôichi, elle est perdue, déboussolée et ne sait qui elle aime vraiment. C’est en ce sens que cet album de la série pourrait attirer un autre public, friand d’histoires de cœur; mais aussi donner une autre dimension à l’histoire.
Le graphisme n’a pas beaucoup bougé depuis le début de la série, signe de stabilité de l’auteur. Le style est très fin, épuré et composé d’aplats de noir, ainsi que d’une utilisation régulière mais réussie de trames. Mais, ce dessin pourrait laisser froid. Non pas qu’il soit inexpressif, bien au contraire, mais l’aspect « numérique » pourrait en gêner plus d’un, comme avec Gantz d’Oku Hiroya (chez Tonkam). Par contre, le découpage est toujours aussi vivant, la narration fluide et les cadrages impeccables. Certaines « prises de vue » sont d’ailleurs des plus réussies. Bref, une narration brillamment « orchestrée » dégageant une fraîcheur certaine.
L’histoire est ancrée dans le monde réel, mais du surréel vient vite s’y ajouter. Yoshitomi aime à ajouter des touches futuristes à son récit – ce qui lui confère d’ailleurs un aspect visionnaire non négligeable – avec par exemple l’importance folle de la machine qui pourrait remplacer les organes, mais aussi des méthodes de médecine révolutionnaires bien qu’inquiétantes. L’atmosphère est assez légère, mais ces quelques éléments viennent l’étoffer et lui donner une profondeur et un intérêt supplémentaires.
En effet, l’intérêt principal de la série est son personnage principal : Ray. Au fil des volumes, nous en apprenons plus sur elle, son passé, ses sentiments, et nous finissons par la comprendre et nous y attacher. Mais ses coéquipiers sont eux aussi relativement intéressants. Shinoyama, de par son dévouement et sa virtuosité, est quelqu’un de très attachant, un ami fidèle; de même pour monsieur Sawa, le dirigeant de l’hôpital. A noter que le passage éclair de Bolt Crank est une très bonne idée qui permet une parfaite transition avec l’autre œuvre de l’auteur, Eat-Man, parue le même mois en France.
Ray ne fait pas partie de ces œuvres qui surprennent par leur originalité et leur inventivité. Bien sûr, des idées originales s’ajoutent au synopsis, mais ce n’est pas ce qui fait la qualité du manga, l’intérêt se trouve autre part. La trame principale est d’ailleurs assez courante, il s’agit d’une vengeance et de la recherche de ses origines, mais c’est la manière dont c’est amené qui est intéressante. Ici, nous voyons le monde à travers les yeux de Ray, et nous nous y identifions très bien grâce à une mise en page intelligente et des événements bien amenés.
Au final, ce tome s’avère être de bonne facture, et dans la lignée des précédents. Si vous avez apprécié le début, nul doute que vous passerez encore un agréable moment, mais si vous n’adhériez pas auparavant, penchez-vous sur une autre série, car votre avis ne changera sûrement pas. Dans tous les cas, Ray est selon moi une bonne pioche d’Asuka, un manga frais, léger et agréable à suivre grâce à un dessin sobre mais propre à l’auteur, des personnages intéressants et une bonne ambiance.