Voici l’oeuvre d’un mangaka plutôt célèbre dans son pays, Morohoshi Daijirô. Au programme, dix histoires courtes mettant en scène un duo de filles, l’une étant une bouquineuse à lunettes, l’autre une fille un peu simplette. Se greffant au genre de l’horreur et l’épouvante, l’auteur ne nous propose pas pour autant une oeuvre où le gore a son mot à dire. Prenez une situation plutôt terrifiante, mettez en scène nos protagonistes et leur flegme abusif, et vous aurez droit à des situations complètement absurdes, un humour noir et décalé où l’on dépasse les limites de l’horreur pour arriver à l’incompréhension, le délire, et l’humour. Dans la première histoire, Shiori demande à Shimiko de se rendre chez elle pour lui montrer quelque chose : elle a une tête de cadavre dans une petite glacière pour la pêche, qu’elle a ramassé la nuit dernière, et elle ne sait pas trop quoi en faire. Shimiko lui apporte alors un livre intitulé ‘Comment élever une tête décapitée’, et à partir de là , Shiori va pouvoir élever sa tête comme un poisson, en la mettant dans un aquarium, en lui donnant de la nourriture. Vous avez dit absurde ? C’est peut-être le mot adéquat, mais on ne peut s’empêcher d’être fasciné par le stoïcisme de nos deux jeunes filles. Les autres histoires ne nous laissent pas en reste, et l’absurde côtoie l’humour, quand on voit par exemple un squelette en armure des temps anciens essayer de faire un karaoke, ou quand un cuisiner incite des jeunes filles au suicide. Dérangeant, mais envoûtant, voici comment pourrait être décrite cette oeuvre dans laquelle l’auteur fait des clins d’oeil plus ou moins évidents à divers inspirateurs de la communauté fantastiques, comme Poe ou Lovecraft, via l’utilisation du nom Cthulhu pour un personnage par exemple. A cela s’ajoute un dessin aux traits plutôt forts, épais, imprécis, qui semblent venir d’un autre temps et qui ajoutent à l’ambiance spéciale qui transparaît dans ces bulles ; la mise en scène est quant à elle classique, vieillotte, le manque d’impression de mouvement des personnages y étant pour beaucoup, tout est beaucoup trop figé. A vrai dire, ce manga surprend, et adhérer au style est plutôt difficile, mais après un léger temps d’adaptation, on se fait à ce manga qu’on lira surtout pour l’absurdité des scènes qu’il propose autour de Shiori et Shimiko.