Les scénarii, toujours construits de la même manière, sont une fois de plus maîtrisés et intéressants, même si certains sont plus dispensables que d’autres. Dans ce tome, il y en a de particulièrement intéressants, tels « L’étrange fœtus », « Un sale regard », « La visite d’un tueur », « Accident » et « Une heure jusqu’à la mort »; ce dernier est d’ailleurs particulièrement réussi et nous permet de poser un autre regard sur le rival de Black Jack : le docteur Kiriko, mais nous reviendrons sur ce point plus tard.
Comme à l’accoutumée, le coup de crayon de Tezuka est très réussi. L’auteur insuffle de la vie à chacun de ses personnages et réussit à donner une impression de mouvement, de dynamisme. En effet, ce dessin, bien qu’assez « cartoonesque », est d’une grande richesse, il regorge de bonnes idées et de trouvailles, tant au niveau purement graphique que narratif. Chaque plan est bien choisi et permet de renforcer l’intensité de l’action, ainsi nous pouvons voir des opérations qui nous prennent aux tripes, le destin de Black Jack et de ses patients nous préoccupe, et c’est en grande partie grâce à cette incroyable maîtrise de la mise en page.
Le ton choisi dans ce manga est plutôt réaliste, mais des petites touches de surréel viennent s’ajouter à l’ambiance générale de l’œuvre. En effet, ces situations sont très étonnantes et les maladies sont parfois à la limite du crédible, néanmoins Tezuka réussit à garder une certaine crédibilité et à rendre sa bande dessinée passionnante. L’humanisme du docteur est d’ailleurs toujours présent, et plus que jamais dans cet album particulièrement bon.
Les personnages sont une fois de plus très nombreux et souvent intéressants. Nous retrouvons beaucoup de guest stars d’autres œuvres du dieu des manga, ainsi que le rival du génial et humain docteur Black Jack : le docteur Kiriko. Cet homme pratiquant l’euthanasie, derrière ses airs d’assassin, est réellement intéressant, et le voir s’allier à Black Jack pendant un chapitre est réellement excellent et inattendu, et ce protagoniste s’impose ainsi comme l’un des plus complexes de l’œuvre. Je vous laisse découvrir ses qualités, mais force est de constater qu’il m’a surpris et fasciné au cent deuxième chapitre.
Original pour l’époque, Black Jack ne fait pas que raconter des opérations spectaculaires, ce shônen décrit également le côté intéressé de certains médecins au Japon. Néanmoins, nous découvrons la foi en l’homme de l’auteur à travers des personnages tel le docteur Ito, ou encore l’importance de la vie dans le chapitre qui clôt ce huitième Black Jack. Ambitieux, innovant, réjouissant, ce manga a marqué le monde du manga et a su inspirer de nombreux auteurs par la suite (par exemple Urasawa Naoki dans Monster et Satô Shûhô dans Say Hello to Black Jack).
Comme dans toutes séries composées d’historiettes, il y a des hauts et des bas. Ce volume-ci est particulièrement intéressant et certains chapitres s’imposent sans difficultés parmi les meilleurs. Les relations qui se tissent entre Black Jack et ses patients sont souvent touchantes et prouvent une fois de plus la maîtrise de Tezuka dans l’art de la narration. Un travail exemplaire qui prouve, une fois de plus, que le dieu des manga se débrouille dans tous les domaines.